Droits du conjoint survivant face à la réserve des enfants

L’équilibre entre les droits du conjoint survivant et la réserve successorale des enfants est un enjeu central du droit successoral. Le Code civil garantit une part minimale aux enfants tout en permettant au conjoint de bénéficier de droits particuliers par donation entre époux. En pratique, l’application de ces règles peut générer des conflits lorsque les droits du conjoint semblent empiéter sur ceux des enfants.

Cette étude de cas illustre cette tension : un défunt, marié plusieurs fois, décède sans testament, laissant une veuve sous le régime de la communauté et plusieurs enfants issus de mariages différents. La veuve, bénéficiaire d’une donation entre époux, choisit un quart de la succession en pleine propriété et trois quarts en usufruit. Certains enfants contestent, estimant que cette option excède la quotité disponible et porte atteinte à leurs droits légaux.

L’article 735 du code civil prévoit l’égalité successorale entre tous les enfants, tandis que l’article 913 fixe la réserve : moitié pour un enfant, deux tiers pour deux, trois quarts pour trois ou plus.

Selon l’article 757, le conjoint survivant reçoit un quart en pleine propriété (ou l’usufruit total si les enfants sont communs).

L’article 1094-1 permet une donation plus avantageuse entre époux, dans les limites de la réserve, d’un quart en propriété et des trois quarts en usufruit.

Pour protéger les enfants, l’article 758-6 impose que la donation soit imputée sur les droits du conjoint. La Cour de cassation (1re civ., 17/01/2024) confirme ce principe, assurant l’équilibre entre intérêts concurrents.

Bien qu’une donation entre époux soit révocable de son vivant (art. 1096), elle devient irrévocable après décès, et les enfants ne peuvent agir qu’en réduction si la réserve est dépassée.

Cette affaire souligne la nécessité de concilier protection du conjoint survivant et respect de la réserve successorale, pilier fondamental du droit successoral français.