Contrats internationaux et Guerre en Ukraine – Les conséquences juridiques sur les contrats

L’actualité nous révèle le quotidien des entreprises depuis le début du conflit.

On parle d’augmentation des prix des fournitures, de la pénurie des matières premières empêchant l’exécution des contrats, de remboursement d’avance du fait de l’arrêt des contrats, des risques de taux de change, d’interdiction de vente de produits aux pays sous embargo, de fermeture d’entreprises dans les pays impactés par le conflit, de la saisie des biens appartenant aux oligarques russes, de la suspension des garanties à l’export, d’annulation des voyages touristiques, des risques d’ordre pénal, de cyberattaques …

1. Historique

  • 2012 : IRAN
L’embargo avait fait l’objet du Règlement européen n° 267/2012 et la plupart des sanctions avaient été levées par l’accord de Vienne du 16/01/2016. Les sanctions concernaient la vente de biens de double usage visés à l’annexe du Règlement européen. Les sanctions portaient sur les avoirs des personnes visées par les Règlements.
  • 2014 : RUSSIE (Crimée)
Des dispositions similaires à celles de 2022 avaient été prévues à l’époque. Règlement UE 269/2014 du 17/03/2014. Règlement UE 833/2014 du 31/07/2014.
  • 2022 : RUSSIE (UKRAINE)

2. Texte d'Ordre public

Règlements Européens

Il a été publié plusieurs Règlements européens au titre des sanctions dont les références vont vous être données.

UE 2022/328 du 25/02/2022, UE 2022/428 du 15/03/2022, UE 2022/576 du 08/04/2022.

Ces Règlements ont institué des mesures de gel d’avoirs et de ressources économiques à l’encontre de près de 400 personnes physiques et morales et des mesures de restriction concernant les activités commerciales entre l’Union Européenne et les régions du Donbass puis de la Russie entière.

Le nombre des personnes visées a ensuite été augmenté.

Il a été ajouté :

– L’interdiction de survol de l’espace aérien par des avions détenus par des personnes russes ;

– L’interdiction d’exporter et de vendre certains produits en RUSSIE notamment biens et technologies à double usage, dont la liste figure dans les annexes (pétrole, avion, industrie spatiale, fourniture de services connexes) ;

– L’interdiction de toute transaction avec la Banque Centrale de RUSSIE et de certaines opérations financières ;

– L’interdiction affectant les activités commerciales avec la Biélorussie ;

– Déconnection du réseau SWIFT pour les transferts financiers ;

– L’application de sanctions pénales pouvant aller jusqu’à 5 ans d’emprisonnement et des amendes ainsi que des interdictions complémentaires d’exclusion de marchés publics, l’interdiction d’exercer.

Loi Martiale en UKRAINE (24/02/2022) dont les termes principaux sont les suivants :

– Restriction des changes limités à une durée de 90 jours à compter du 05/04/2022 ;

– Transfert de devises pour l’achat de biens limité ;

– Des exceptions sont prévues pour les transferts de fonds entre la RUSSIE et l’UKRAINE pour le paiement des salaires ou de charges sociales ou de taxes ;

– Il est institué un contrôle de l’énergie notamment pour le gaz, à la fois en export et en import ;

– Nourriture : interdiction d’importer toute nourriture de RUSSIE ;

– Propriété intellectuelle : l’Institut de propriété intellectuelle ukrainien continue son activité et les délais légaux sont suspendus ou prolongés ;

– En matière immobilière, l’activité du registre des propriétés est suspendue et aucune transaction ne peut donc être enregistrée ;

– Des mesures spécifiques sont prises pour les transports.

3. Aides de l’Union Européenne et des Etats Membres

Parallèlement, l’Europe a décidé de subventionner les entreprises affectées par le conflit et des indications sont prévues.

La Commission européenne, dans une déclaration du 23/03/2022, a adopté des dispositions pour soutenir l’économie dans le contexte de l’invasion de l’UKRAINE par la RUSSIE.

Une plus grande flexibilité des règles en matière d’aide d’Etat est établie pour faire face à cette situation, tout en préservant des conditions de concurrence équitable au sein du marché unique.

Sont prévues des mesures d’indemnisation des entreprises pour le surcoût dû au prix exceptionnellement élevé du gaz et de l’électricité.

Les montants d’aide sont limités à 35.000 € pour les entreprises du secteur agricole et 400.000 € pour les autres secteurs.

Mesure de soutien de trésorerie sous forme de garantie publique et de prêt bonifié.

En France, il a été prévu des mesures pour compenser les pertes des titulaires de marchés publics au titre de l’imprévision et des principes d’indemnisation ont été fixés.

4. Le Sort des contrats

Sur le plan juridique, on peut se référer aux notions de force majeure incluant, le cas échéant, l’embargo, de hardship pour le coût excessif des contrats.

Dans les pays de droit civil, il y a souvent des lois qui sont supplétives de la volonté des parties.

En revanche, en Common law, il faut prévoir les conditions de la force majeure, de l’embargo et du hardship dans un contrat.

Il est conseillé aux clients de revoir leurs contrats à ce sujet et d’inclure pour l’avenir des dispositions leur permettant de se dégager des contrats en cas de conflit du type de celui que nous vivons comme cela a pu être fait pour la période du Covid.

Il faut également se référer à ce qui a pu être fait sous embargo de l’Iran ou sous embargo de la Russie lors de l’invasion de la Crimée.

 

Attention toutefois aux restitutions.

En effet, la force majeure exonère le débiteur de l’obligation de l’exécution de celle-ci et de tous dommages et intérêts.

Mais les parties sont remises dans l’état où elles étaient avant la signature du contrat et si l’une des parties a perçu une avance, elle doit la restituer.

Autre conséquence : La force majeure peut être une cause de suspension du contrat. Il faut donc savoir qui va payer les frais de sauvegarde le cas échéant.

 

Notification : En tout état de cause, si le conflit a eu une conséquence sur le contrat, il faut que la partie victime notifie à l’autre partie la cause de force majeure ou de hardship ou d’embargo pour en bénéficier.

 

Exemples de contrats annulés du fait de l’interdiction de commercer avec la Russie

Conséquences pour les contrats d’agent commercial : annulation

Conséquences pour un contrat de distribution : annulation

Conséquences pour une filiale autonome en Russie ou en Ukraine : maintien

Conséquences pour une succursale : annulation

Gel des avoirs (freezing of assets) : saisie du patrimoine des personnes concernées, interdiction de vendre ou de louer un immeuble, un navire ou des actions, interdiction de recevoir des dividendes.

5. Assurances à l’export

Les principaux organismes ont dégradé la note de la RUSSIE et de l’UKRAINE ce qui ne permet plus de couvrir les relations commerciales avec ces deux pays.

Documentation à disposition.

6. Assurance Cyberattaques

Le conflit a entrainé une suractivité des cyberattaques et il faut prévoir les assurances à ce sujet.

Un arrêt de la Cour du New Jersey du 06/12/2021 a condamné l’assureur d’une société pharmaceutique à la somme de 1,4 milliards de dollars afin de l’indemniser à la suite d’une cyberattaque par rançon giciel.

Un exemple de l’intérêt de l’assurance.